Je suis Vivienne Balibar. Suédoise, je vous avouerais qu'il y a plus scandinave comme patronyme, mais il a fait de moi un être unique, exceptionnelle, orgueilleux je l'avoue aussi. Je ne vous demande, et ne vous permet, ni de me juger ni même d'essayer de me comprendre. Certains s'y sont risqués et ont malheureusement perdue beaucoup de plumes. Théol est surement la seule personne qui me comprenne réellement ...

Le bruit du papier que l'on froisse, l'odeur des vieux bouquins m'ont toujours fait fantasmer. J'ai une grande attirance pour les vieilleries en tout genre. Cela remonte à mon enfance. Petite dernière d'une famille de quatre rejetons, j'ai grandi au milieu d'un univers purement masculin, ma mère étant décédée lorsque j'avais trois ans dans un crash d'avion. Autant dire que je ne l'ai jamais vu, le seul souvenir qui me reste d'elle est un médaillon, je crois que c'est mieux ainsi. J'ai un caractère plutôt sensible, certains me diront hyper émotive. J'ai la larme facile, c'est pour cela que j'ai très vite appris à me construire une armure, un coeur de glace.

J'ai toujours été très proche de mes frères, surtout Anders, l'ainé, le protecteur qui nous a tous conduit dans les sombres travers. Mon père nous a vu grandi de très loin, la vie familiale ne devait pas l'intéresser, ce n'est pas pour autant que nous avons manqueé d'amour. Il nous aime, mais de loin. Nous voir crier autour de lui, devoir nous embrasser ou nous sourire lorsqu'on ramènait une bonne note devait insupporter. On s'y habitue très vite à cette amour lointain.

Si enfant j'étais une gamine renfermée et rêveuse, j'ai passé mon adolescence à foncer. Je voulais tout vivre ... C'est ridicule de dire cela. Quand s'arrête réellement l'enfance, l'adolescence, quand sommes-nous adultes ? Je ne suis qu'une gamine vicieuse. J'ai beaucoup de travers, quelques qualités enfouit. Une sale garce. Une rage voulait exploser, je l'ai laissé me gagner, elle ne me quitte plus. J'ai commencé à sortir, avec mes frères puis avec des relations plus ou moins saines. J'ai fait pas mal de conneries, je crois qu'à ce niveau je me suis assagie.

Une seule chose réussit à me calmer, à me transporter dans mon monde que j'avais imagineé gamine: le dessin. Mais là encore ceux sont des créations torturées, à peine esquissées ou glauque, très glauque. Je suis bizarre, a weird girl. On me l'a souvent répété.

La première fois que j'ai entendu parler des âmes, je pensais qu'il s'agissait dans trip qui ne finissait pas. J'attendais les descente, mais je l'avais déjà faite. C'était bien la réalité. L'idée que quelqu'un de tout sage et tout mignon et tout jolie puisse prendre la place de quelqu'un d'autre, se servir de son enveloppe charnelle me paraissait terriblement horrible. Je me suis mise à les haïr. De vrais monstres, des tueurs qu'on laissait en liberté.

Je ne sais comment je suis devenue l'hôte de Théol. Un vrai mystère, elle se montre muette à ce sujet, je sais uniquement je suis son premier hôte, qu'elle trouvait mes cheveux beaux. Elle m'a semblé aussi perdue que moi, plus douce et aussi très naïve et malléable. Petit à petit, j'ai réussi à re-maitriser mon corps, mais elle est toujours là. Je crois qu'elle préfère que nous soyons deux. Moi aussi au fond, elle est un peu la soeur que je n'ai jamais eu, je ne suis jamais seule.


Le médecin disait qu'elle était d'accord, que si elle dormait et puait l'alcool était parfaitement normale. C'est mon premier hôte, je ne sais vraiment comment il faut s'y prendre. Je crois que je n'aurais jamais dû accepter de partir aussi tôt, je n'étais pas prête. Au début, elle me parlait, me racontait sa vie, me posait beaucoup de questions. Elle insultait aussi beaucoup de monde, pas moi uniquement. Et puis Viv', comme l'appelle ses amis, est devenue de plus en plus ... triste ? Je ne savais pas qu'un hôte pouvait cohabiter avec une âme, j'ai très vite conclus que c'était de ma faute, je n'étais pas prête et que je lui faisais beaucoup de mal. Les gens autour d'elle ne reconnaissaient plus la Viv'qu'ils connaissaient, ils l'a regrettaient, ils me méprisaient. Je lui ai laissé le contrôle. C'est mieux ainsi, elle a réussi à me convaincre qu'on ne pouvait pas changer le monde, la seule solution résidait dans l'imaginaire de l'enfance. J'essaye tout de même de calmer ses ardeurs, je crois que j'ai réussis en l'emmenant ici. Ses frères, surtout Anders, et ses amis ne sont plus là pour la débaucher. Du moins pour l'instant.